Les vendredis 5, 12 et 19 février 2016 de 16 à 18 heures à Auch, à la Brasserie Daroles (ouvert à tous , sur inscription )
« Voici la présentation de l’atelier faite par Taro Ochiai sur son site : http://kansenkai.com/post/138187772687/ « ,
Mon arrière-grand-père était calligraphe. Le kakémono qui orne le kamiza du Kansenkaï Petit Dojo est de sa main. Il a écrit le kanji 寿 kotobuki de soixante-dix-huit manières différentes.
寿 kotobuki est utilisé dans le sens de “félicitations !” sur les enveloppes contenant un don monétaire qu’on offre à l’occasion d’un événement heureux tel un mariage. Il ne s’agit rien d’autre que souhaiter “longue vie” aux mariés puisque 寿 kotobuki est le kanji de la longévité. Le grand public occidental est, sans le savoir, très familier avec ce kanji puisque sushi s’écrit : 寿司, et signifie littéralement : qui administre votre longévité !
Kansenkaï est la contraction de 感覚洗錬会 Kankaku Senren Kaï, groupe où l’on affine la sensibilité. La sensibilité est une qualité essentielle à cultiver car voilà bien une qualité humaine qui “administre la longévité” ! Son développement, enrichissement, approfondissement tout au long de notre vie et jusqu’à l’âge le plus avancé, nourriront l’esprit et le corps, le coeur et l’âme, la curiosité, la joie, la lumière, l’enthousiasme d’être…
Je n’ai pas eu la chance de connaître mon arrière-grand-père mais ce kakémono est une source d’inspiration et d’encouragement quotidienne.
J’ai appris la calligraphie par ma mère qui a été… styliste de mode ! Cela peut sembler anodin et incongru mais imaginez une jeune femme qui veut devenir créatrice de mode dans un Japon des années 50-60 bien plus à cheval sur les conventions et la hiérarchie patriarcale que le Japon d’aujourd’hui (et vous savez combien même le Japon actuel a encore une idée assez arrêtée sur la place que chacun se doit d’occuper dans la société). Mais il y a des personnes pour qui la phrase “il faut vivre sa passion” a un véritable sens. Après 10 ans de combats que l’on n’imagine pas, elle s’est fait une place dans le métier et de grands stylistes de mode aujourd’hui mondialement connu l’ont appelée sempaï…
L’usage du corps
Dans les arts mariaux, les grands maîtres, tels que Hino sensei ou Kuroda sensei pour citer ceux que je suis, ont consacré leur vie à la maîtrise du corps et de l’interaction avec l’autre ; ils en ont développé un waza, autrement dit une technique, un art, au sens de la haute maîtrise des choses. Le waza est une compétence de haut niveau qui est propre à la personne et qui ne peut pas se transmettre et qu’on ne peut imiter. L’élève n’a pas d’autre choix que de développer, affiner, polir son propre waza : dans le processus de ce qu’on appelle communément la “transmission”, le rapport maître/élève n’a pas d’autre finalité.
De grands maîtres d’arts martiaux sont aussi de grands calligraphes. Bien sûr, historiquement, le samouraï avait pour mission de cultiver la pratique des armes mais aussi la pratique des lettres. La calligraphie en faisait évidemment partie. L’écriture au pinceau ne présentait d’ailleurs aucune forme de solennité particulière puisque c’était là la manière la plus ordinaire de mettre les choses par écrit. Mais le samouraï cultivait également la poésie. Il devait connaître la littérature mais il se devait aussi d’être un homme de lettre complet capable composer un poème. Le samouraï était d’abord un administrateur des affaires du fief. C’était donc avant tout un bureaucrate. On peut comprendre que tous les samouraïs n’étaient pas des experts du sabre, de même qu’ils n’étaient certainement pas tous de grands poètes. Mais ce double apprentissage faisait partie de leur cursus.
Mais la maîtrise du pinceau de certains maîtres japonais est si l’on peut dire naturelle, provenant de la qualité transversale de leur waza. Il est étonnant de voir comment de tels maîtres arrivent à égaler voire dépasser les meilleurs dans leurs domaines, qu’il s’agisse de sportifs, de praticiens… de calligraphes.
Extraordinaire calligraphie du fondateur de l’aïkido : masakatsu akatsu katsuhayabi —
vaincre sans vaincre, c’est la victoire indubitable et instantanée sur soi-même
(source : http://www.chie-project.jp/002/no01.html)
Pour ma part, je suis encore loin d’avoir le niveau d’un maître. J’ai débuté l’aïkido il y a 30 ans mais cela ne fait que 5 ans que j’emprunte une voie spécifique, celle qui appelle à une modification de l’utilisation du corps, proposée par Léo Tamaki, Hino sensei, Kuroda sensei… Et mon usage du corps se modifiant, je constate des effets appréciables. Notamment dans la calligraphie.
La calligraphie était pour moi une activité de fond sur laquelle je venais me poser de temps à autres. Mais je l’ai proposée comme complément aux cours de japonais que nous avons lancé en arrivant à Auch. Nous avons alors été contacté par Joëlle Reynaud de l’association Auchine qui nous a parlé d’un groupe de personnes intéressé par la pratique de la calligraphie. C’est ainsi que ce projet est né.
L’atelier d’étude de la calligraphie du Kansenkaï
L’étude passe généralement par la reproduction de calligraphies de référence qui servent de moule — 型 kata — à notre geste. Mais avant cela, un des objets de ce premier atelier en trois parties consistera à comprendre et à apprécier le fait que ce ne sont pas tant des graphies à recopier au pinceau mais qu’il faut littéralement faire une danse où le corps est sollicité dans sa globalité — même si c’est de manière parfois infime — pour tenter d’habiter la graphie. Et c’est cette recherche qui permettra d’approcher la petite musique du geste et son ressenti.
Des éducatifs parsèmerons les séances afin de connecter le corps et le pinceau, sentir la feuille, sentir l’espace, sentir le rythme du geste… L’exploration de la contrainte des formes est une passerelle. La calligraphie n’est pas tant l’art de la belle écriture que celui d’une recherche du geste qui saura habiter une “atmosphère”.
Ma mère n’était en rien un maître de calligraphie mais elle m’a fait entrevoir la richesse de la calligraphie, celle qui forme l’esprit mais aussi le coeur. Car le propos de la calligraphie comme de tout art n’est pas seulement d’établir une connexion technique avec le réel d’objets extérieurs — ici : papier, pinceau, encre, graphies… — mais aussi avec soi-même.
Telle est la modeste proposition d’exploration proposée par cet atelier.
Bien à vous,
Taro
INFORMATIONS PRATIQUES
DATES : 5, 12 et 19 février
HORAIRES : 16H – 18H
LIEU : Brasserie Le Daroles, Place de la Libération 32000 Auch
TARIFS : 45€ le stage complet , 20€ une session
Atelier ouvert à tous les adhérent.es- Nombre de place limité
Matériel fourni, mais vous pouvez venir avec votre matériel